Il y a de cela 22 ans, le Tchad faisait son entrée dans la très prestigieuse liste des pays producteurs de pétrole. De grands espoirs sont placés en cette manne pour redynamiser une économie nationale dépendante de l’agriculture et de l’élevage. Deux décennies après, les Tchadiens sont partagés sur le changement réel induit par cette manne dans leur quotidien.
Le 10 octobre 2003, feu le président, le Maréchal du Tchad Idriss Déby Itno inaugurait l’ouverture des vannes du champ pétrolier de Doba. Le 12 juin 2004, à Kribi dans le Sud du Cameroun, une autre page de l’histoire du Tchad s’écrivait ; la construction de l’oléoduc de plus de 1000 kilomètres entre les deux pays est bouclée. Un autre pas de franchi ; les premièrs barils de l’or noir tchadien sont sur le marché. Après les puits de Doba, le Tchad a mis en exploitation d’autres champs pétroliers, entre autres, Badila, Mangara, Rig-Rig, etc. Tous les espoirs étaient permis. Le pétrole devrait changer la vie des Tchadiens, sortir le pays de la pauvreté et poser les jalons de son essor socioéconomique. Mais hélas, les Tchadiens sont très vite désenchantés ; leurs espoirs douchés dans une gouvernance limitée et une gestion complètement opaque.
Le Tchad, en tant que pays, n’a pas échappé à la prédiction de la malédiction de l’or noir connue par les autres Etats avant lui. La misère des populations, le regret des espoirs et une pauvreté toujours ambiante. Les bonnes lois, mesures et mécanismes de contrôle se sont dissipés peu à peu, dans un mutisme aggravé par des actions indispensables à un droit de regard de leur part. Le Collège de contrôle et de surveillance des ressources pétrolières du Tchad qui avait un mandat est dissous, l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE), et les sociétés civiles impliquées ne sont plus visibles dans le contrôle et le suivi des revenus pétroliers à eux conférés, faute d’une gestion peu contrôlée.
Une pauvreté ambiante
Le Tchad n’a finalement pas échappé à la malédiction de l’or noir. Les dépenses, les investissements dans les secteurs prioritaires, la réserve des générations futures, etc., sont remis en cause.
Il est vrai, le Tchad a eu beaucoup d’argent, grâce à l’audace des autorités politiques qui ont mis en musique la politique d’extraction des ressources naturelles avec des réalisations dans les secteurs comme la santé, l’éducation et l’enseignement supérieur où des universités, des instituts universitaires et écoles professionnelles. Un pas franchi ; mais c’est du lendemain, du futur, pour envisager un autre lendemain. Les villes productrices de l’or noir ne reflètent pas ou ne militent pas en faveur de l’image des régions, provinces qui alimentent le pays tout entier.
Selon les prévisions de la Banque mondiale, en 2003, la réalisation du programme d’exploitation du champ de Doba seulement est d’un coût d’environ 3,7 milliards de dollars et rapportera à l’État tchadien 2 milliards de dollars par an pendant 25 ans. Le gisement de Doba dans le sud du pays est le premier site d’exploitation qui devrait fournir 225 000 barils par jour.
Mbaïadoumbeye Blaise