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Héritage familial [Dossier 3] : « Les lois de la République doivent prévaloir », Me Delphine Kemneloum Djiraibé

La juriste et avocate à la Cour d’Appel de N’Djamena déplore le fait que jusqu’aujourd’hui le Code des personnes et de la famille ne soit pas adopté au Tchad.

L’Info: Qu’est-ce que dit la loi au sujet de l’héritage familial au Tchad ?

Me Delphine Kemneloum Djiraibé : L’héritage est une question qui est source de problème dans plusieurs familles, malheureusement, le Tchad ne dispose pas encore d’un Code des personnes et de la famille qui devrait régler cette question. Depuis, nous continuons à fonctionner avec le code civil de 1958. Depuis 1958, il y a eu beaucoup d’évolution,  même en France par rapport à la question de la succession. En dehors des lois tchadiennes, la base qu’est la Convention contre toute élimination de toute forme de discrimination à l’égard de la femme. Cette disposition met la femme sur le même pied d’égalité que l’homme. Donc, le principe de la non-discrimination, de l’égalité des sexes et de tout ce que prône la Déclaration universelle des droits de l’homme, est reprise dans cette convention. Quand un conjoint meurt, s’il y a des biens, le conjoint survivant peut l’exercer notamment hériter de son conjoint défunt. Dans la plupart des cas, dans notre société, c’est quand un père de famille décède que les problèmes surgissent. Dans le cas où le défunt a plusieurs épouses et des enfants de mères différentes, ils vivent en concurrence pour l’héritage. Si le défunt laissait un testament, cela éviterait des conflits. Aussi, même s’il y avait un testament, toujours est-il que certaines familles rejettent celui-ci sous prétexte qu’il aurait été falsifié. La loi dit qu’après la mort de l’époux, l’épouse ou les épouses et les orphelins doivent hériter équitablement. Même si dans la communauté musulmane, le garçon hérite plus que la femme, par contre la loi de la République ne fait pas cette différence de sexe.

Pratiquement, est-ce que le caractère laïc de l’Etat est respecté ?

Dans une République, ce sont les lois de celle-ci qui doivent être appliquées au détriment des us et coutumes des communautés. Bien qu’au Tchad, il y a une diversité mais les normes doivent prévaloir. Si l’on veut appliquer les coutumes dans ce cas d’espèce, il n’y aura pas une harmonisation, car les partenaires parfois ne sont pas issus de la même communauté, du même clan ou de la même ethnie. C’est pour cette raison que les lois de la République sont faites et doivent être appliquées à la lettre. Mais, au Tchad il n’y a pas de rigueur à ce niveau et cela nous pose sérieusement de problème.

Et si le couple n’a pas fait d’enfants, qui doit hériter ?

Ce sont les parents proches du défunt ou de la défunte : frères, sœurs, etc. Il y a toute une panoplie de règles qui tranche ce genre de situation mais la loi est déjà désuète. Sinon une personne proche du défunt saisit le juge pour de telle affaire. Il y a un vide juridique à ce niveau car le code des personnes et de la famille n’existant pas et la loi de 1958 déjà aussi caduque pour des intérêts communautaires et individuels. Tous les problèmes que nous connaissons au sein de nos familles, que ce soit la polygamie ou le droit à la succession, c’est à défaut du code de la famille.

 Quelles sont  les pistes de solutions à explorer ?

Les solutions sont sous la main: l’adoption du code des personnes et de la famille qui est en train de souffrir dans les tiroirs depuis tant d’années et les textes de la République doivent être appliqués à la lettre. Cela est un combat de tous. Le code de la famille jouit d’une importance parceque la société évolue et on ne peut avancer sans tenir compte de ces différentes évolutions. Sans quoi, nous nous croyons dans une jungle.

Kary  Amadou  & Remadji Clarisse

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